Retraité en Normandie, l'ancien crack Ourasi toujours bien dans ses sabots
De Déborah CLAUDE (AFP) – Il y a 11 heures
Le trotteur Ourasi, le 31mars 2010 près de Bayeux
Ourasi à l'écurie, près de Bayeux, le 31 mars 2010
BAYEUX — Quadruple vainqueur du Prix d'Amérique, le trotteur légendaire Ourasi qui s'apprête à fêter ses trente ans est un "vieillard" en pleine forme, coulant une retraite paisible dans son haras normand.
Le trotteur fêtera son anniversaire le 7 avril au haras de Gruchy lors d'une fête avec "tarte normande et cidre bouché", sous les couleurs jaune et bleue de la casaque de Jean-René Goujeon, son driver aujourd'hui décédé.
"Il n'a aucune boiterie. Cela fait quatre ans qu'il n'a pas vu le vétérinaire!", s'étonne Pierre Lamy, l'ange gardien du vieux champion.
Dans son box, le dos un peu creusé, la barbichette un peu blanchie et des "salières", les creux au-dessus des yeux, marquées, trahissent quand même un peu son âge.
Mais quand "le roi fainéant", il n'en faisait toujours qu'à sa tête et ménageait ses efforts à l'entraînement, revêt son manteau pour sortir, il n'a nullement l'air fatigué pour "un bonhomme de 95 ans" (l'âge équivalent pour un homme), dit Pierre Lamy.
Plus grand trotteur de tous les temps, élu "cheval du siècle" selon M. Lamy, l'alezan brûlé Ourasi est resté dans la mémoire de tous les Français par un palmarès inégalé de 58 victoires, laissant ses concurrents sur le carreau.
Seul trébuchement en 1989, au faîte de sa gloire et parti ultra favori, il finit troisième du prix d'Amérique devant des milliers de spectateurs et le président de la République François Mitterrand venu admirer la star.
La faute à une vessie trop remplie d'après les spécialistes.
Mais le trotteur au sale caractère prendra sa revanche en 1990, et entrera ainsi dans la légende en remportant son quatrième prix d'Amérique.
D'ailleurs, dit Pierre Lamy, sur le ton de la confidence, sa longévité exceptionnelle "ferme la claque à tous ceux qui ont dit qu'il s'était dopé" car il y a eu "beaucoup de jalousie autour de ce cheval".
L'année dernière, près d'un millier de visiteurs, parfois de l'étranger, sont venus voir le trotteur, seul étalon au haras au milieu d'une armée de juments.
Il n'a d'ailleurs jamais fait d'étincelles avec ces dames, se révélant être un piètre géniteur. 38 enfants seulement, dont aucun champion, après sa longue carrière, qui, selon certains aurait entamé sa fertilité.
C'était un étalon "fougueux", raconte M. Lamy, "mais une fois attelé, quand il passait devant les juments, il ne les regardait même plus".
Pourtant Ourasi n'était "pas très bien né". "Parfois, c'est comme cela que sortent les cracks", explique-t-il, pendant qu'Annie, fervente admiratrice qui vient chaque matin depuis huit ans, lui coupe quelques carottes. La demi-soeur d'Ourasi, Vourasie, a fait aussi une brillante carrière.
La vieillesse a toutefois assagi la "force de la nature" qu'est Ourasi. Il y a quelques années, il avait arraché l'oreille d'un maréchal-ferrand. Quant à monter sur le dos de ce cheval au fichu caractère: "pfffff....jamais été possible!", rigole M. Lamy.
Une fois dans son enclos, son "paddock" qu'il partage avec deux vaches, Ourasi consent du bout des sabots à faire quelques foulées.
Superbe, il se met alors à trotter avec classe quelques centaines de mètres, mais pas plus, comme s'il avait compris que ses visiteurs étaient bien venus pour vérifier qu'il avait encore le trot vif et élégant, malgré ses trente ans.